Source : Le Figaro, 04 février 2022
Où pourrons-nous encore skier dans 20 ans ? Les effets du changement climatique sont là et se font sentir dans les stations de ski. «Nous avons déjà perdu l'équivalent d'un mois de neige, par rapport aux années 1970, à cause d'hivers plus courts», constate Samuel Morin, chercheur et directeur du CNRM (Centre national de recherches météorologiques). «Depuis 2008, toutes les saisons ont été compliquées», remarque, lui, Philippe Padelli, du domaine des Gourettes, près de Lourdes dans les Pyrénées.
Tous les lieux ne seront pourtant pas touchés dans les mêmes proportions. Pour comprendre où la situation sera la plus critique, nous avons comparé les projections pour 95 stations des Alpes et 26 des Pyrénées selon deux critères complémentaires : l'enneigement moyen hivernal sur la période 2041-2070, et la différence que cela représente par rapport au niveau de référence (1976-2005). Les résultats sont sans appel: certaines stations sont bien plus menacées que d'autres, mais pour la plupart, il faudra inventer un nouveau modèle touristique. Quelques rares domaines ne devraient subir aucun changement météorologique majeur.
Il y a quelques (rares) stations qui s'en sortiraient indemnes. Les modèles climatologiques n'y voient pas de manque de neige, au contraire : certaines pourraient même en gagner. Toutes sont situées dans le massif de la Vanoise. Il s'agit de Val Thorens et de Val d'Isère. Tignes et Pesey Vallandry, aussi, seront préservées, ne perdant quelques centimètres.
Tous les domaines de ces stations ont un point commun : ils sont situés à très haute altitude : entre 2450 et 2700m de moyenne. Il n'existe pas de consensus scientifique pour expliquer ce phénomène. «Ce sont des hypothèses, certes il y a le problème de la fonte des glaciers, mais on pense que les épisodes de précipitations seront plus nombreux et plus forts. Et donc à très haute altitude, ça tombera sous forme de neige», détaille le chercheur Samuel Morin.
Nous avons établi quatre tableaux, deux pour chaque montagne (Alpes et Pyrénées).
Nous avons utilisé les modélisations du projet Drias de Météo France, qui recense les scénarios climatologiques des laboratoires de recherche français. Nous avons utilisé la médiane de ces différents travaux, pour le scenario RCP4.5, l'intermédiaire en termes d'actions menées pour ralentir le réchauffement climatique.
Les données. Les chiffres de l'enneigement moyen et de l'écart avec la période de référence sont donnés en cm, de 300m d'altitude en 300m (1200m, 1500m, 1800m, 2100m etc...). Nous n'avons sélectionné que les données des mois de décembre, janvier, février, mars et avril, puis, à chaque fois, nous en avons calculé une moyenne. Puis nous avons arrondi le résultat à l'entier le plus proche.
Les stations. Nous disposions des données par massif (Aravis, Mercantour, Chartreuse, Mont Blanc, Haute-Bigorre etc...). Nous avons calculé des courbes de tendance pour chaque massif. Nous en avons déduit l'enneigement pour l'altitude moyenne de chaque station, obtenue en croisant les données avec celles du site Skidata.io.
Pour l'écart de l'enneigement entre la période de référence et la période 2041-2070, nous avons cherché à définir l'évolution de la neige mètre par mètre, entre chaque portion de 300m, toujours pour chacun des massifs. Ensuite, nous en avons déduit le résultat pour l'altitude moyenne de chaque station.
Limites des résultats : Les modélisations mathématiques ne tiennent pas compte de l'orientation des pistes. Ainsi, un domaine sur un versant nord, moins ensoleillé qu'un versant sud, aura une meilleure tenue de la neige.
Il 'agit seulement des chutes de neige naturelle. Les données ne tiennent évidemment pas compte non plus de la politique en matière d'utilisation de neige artificielle.